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David Belliard: «La question logistique est aujourd’hui devenue prioritaire dans l’agenda de la Ville de Paris.»

par Laurent F.

C’est dans le cadre des 2èmes Rencontres Villes et Entreprises durables consacrées à la logistique et aux flottes d’entreprise organisées le 23 juin dernier par Make A Move que David Belliard nous a reçus. Adjoint en charge de la transformation de l’espace public, des transports, des mobilités, du Code de la rue et de la voirie, il nous en a dit plus sur les ambitions de la ville en matière de logistique.

A quelles évolutions peut-on s’attendre dans la logistique parisienne ?

David Belliard: «Il faut d’abord préciser que, s’il y a encore quinze ans la question logistique était une sorte de zone grise des stratégies politiques publiques, elle est aujourd’hui devenue prioritaire dans l’agenda. Tout particulièrement dans celui de la Ville de Paris. Une actualisation de notre stratégie a été votée l’an dernier qui a cette particularité d’être «work in progress»: nous avons constitué un comité des partenaires qui permet d’échanger de manière régulière, et donc de l’enrichir. L’un des éléments clé est évidemment la question du foncier. Comme on le sait tous, la logistique est en train de se transformer et sa croissance est exponentielle: plus de 500 000 colis sont livrés chaque jour. Notre rôle est donc d’accompagner ces évolutions et ces changements dans nos modes de consommation. 

Mais de quelle façon?

David Belliard: «Nous souhaitons réserver 1% des surfaces immobilières parisiennes à la logistique. L’essentiel des discussions que nous avons eues a porté sur l’actualisation du Plan local d’urbanisme (PLU). Nous avons identifié les lieux qui nous semblent porter un véritable potentiel, et nous travaillons sur le maillage avec des hubs, des micro hubs, des centres logistiques dans Paris intra-muros, mais aussi en connexion avec la banlieue. Cette stratégie s’appuie sur Sogaris qui a été dotée de 500 millions d’euros lui permettant d’acquérir du foncier. Face aux enjeux actuels, nous pensons que la puissance publique a un rôle déterminant à jouer, mais le foncier logistique peut très bien être détenu aussi par des acteurs privés, avec des règles que nous pouvons imposer. » 

Le partage de l’espace public constitue l’un des grands enjeux d’aujourd’hui. Quels sont vos projets?

David Belliard: « Paris (comme les autres métropoles européennes) est en train de se transformer de façon très massive, et l’espace public est devenu plus encore qu’hier un bien commun. Nous avons besoin de le récupérer, de réduire la place de la voiture pour laisser place à des mobilités douces et actives, et d’affecter cet espace à la nature. Tout cela modifie donc profondément la façon dont on doit organiser cet espace. Et notamment ce qui concerne les aménagements réservés aux livraisons. Il suffit d’aller voir sur les réseaux sociaux pour constater qu’il y a souvent des problèmes et que (de façon très légitime) le sujet fait partie des discussions importantes. C’est la raison pour laquelle nous avons décidé de créer 1 000 places de livraisons supplémentaires pour dépasser les 10 000 zones de stationnement. 

Toujours est-il que, face à la nécessité de cette réorganisation, beaucoup de gens ne s’y retrouvent pas, et c’est bien normal. C’est pourquoi nous avons mis tout en haut de notre agenda la question du Code de la rue qui va permettre de trouver une sorte de pacte du «vivre ensemble». Evidemment, le sujet des livraisons (et plus généralement des flux économiques) y est extrêmement important.

 Le chantier des Champs-Elysées occupe une place essentielle dans le plan stratégique de logistique urbaine que nous avons voté

David Belliard

Cela passe par un certain nombre d’expérimentations, comme les livraisons décalées et silencieuses. Quelles premières conclusions en tirez-vous?

David Belliard: «Effectivement, pour limiter les conséquences négatives de l’explosion des livraisons, nous souhaitons expérimenter d’autres façons de livrer. Donc notamment à des horaires décalés plutôt qu’aux heures de pointe. Bien sûr, cela pose la problématique des livraisons silencieuses. Si vous livrez la nuit, elles doivent absolument être silencieuses! Nous avons testé cela dans le 13ème arrondissement avec plusieurs acteurs comme Carrefour-Auchan qui s’appuient sur des véhicules électriques. Les résultats sont très positifs. Et même bluffants. J’ai pu moi-même constater qu’on peut livrer à 5 heures du matin sans gêner les riverains!»

Et les vélos cargos? Ils sont de plus en plus utilisés pour les livraisons du dernier kilomètre, mais quelle place leur est réservée dans la ville?

David Belliard: «Nous avons acté pour eux 1 000 places de stationnement, mais nous irons bien plus loin. Ces places seront multi-usages dans le sens où elles pourront être utilisées tant par les vélos cargos personnels que par ceux dédiés à la livraison. Toutefois, nous réfléchissons à en réserver certaines aux seules livraisons pour inciter aux parcours cyclogistiques

Enfin, parlons mobilité fluviale. Le chantier des Champs-Elysées en témoigne: comme bien d’autres villes, Paris est en train de reconquérir son fleuve…

David Belliard: « Au XXème siècle, les villes se sont construites contre leurs fleuves. Aujourd’hui, il s’agit d’opérer une véritable reconquête et de reprendre contact avec eux. Je ne pense pas que la Seine ait vocation à devenir un axe de transport de personnes massif. Cela devrait rester très marginal… En revanche, le chantier des Champs-Elysées occupe une place essentielle dans le plan stratégique de logistique urbaine que nous avons voté. L’enjeu est évidemment la décarbonation, mais aussi la réduction des flux dans l’espace public

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