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L’arrivée de Renfe va-t-il faire baisser les tarifs de la SNCF?

par Laurent F.

L’opérateur espagnol Renfe vient d’annoncer son arrivée en France à la mi-juillet. Cette nouvelle concurrence va-t-elle faire (enfin) baisser les tarifs de nos trains? Et, d’ailleurs, pourquoi sont-ils si chers? Et si complets? Pour le savoir, nous avons demandé à Alice Rayon, Directrice marketing de la plateforme Kombo, de nous éclairer sur le sujet. Kombo est un comparateur de prix qui propose la vente de billets de train, bus et avion aux meilleurs prix.

Contrairement à ce que l’on aurait pu penser, l’implantation sur le marché français de Trenitalia ne semble pas avoir changé grand chose, non ? 

Alice Rayon: «On a d’abord pensé que la SNCF allait aligner ses tarifs, ce qui n’a pas vraiment été le cas en effet. Aujourd’hui, il existe une vraie différence entre les deux opérateurs. Par exemple, sur un Paris-Lyon Trenitalia propose des billets entre 30 et 40 euros quand la SNCF se situe plutôt entre 70 et 80 euros. Du moins, sur ses trains «classiques». Sur ses Ouigo, en revanche, elle s’est à peu près alignée. La principale différence étant tout de même que le Ouigo est un train low cost quand Treintalia propose au même prix une offre premium

A son tour, Renfe arrive à la mi juillet. Va-t-il faire «bouger les lignes», cette fois? 

Alice Rayon: «A son arrivée Renfe proposera des tarifs d’appel défiant toute concurrence: 9 euros pour les trajets entre les dix gares qui composent ses liaisons domestiques en France. (Notamment entre Marseille, Montpellier, Avignon, Béziers, Aix-en-Provence, Lyon et Narbonne…, ndlr) Bien sûr, c’est génial pour les usagers. Pour un Lyon-Marseille par exemple, la SNCF se positionne entre 45 et 105 euros! Mais il faut garder en tête que ces 9 euros ne sont jamais qu’un tarif de lancement, et que cela ne durera donc pas. Cela étant dit, les lignes ouvertes à la concurrence sont encore extrêmement rares en France, surtout par rapport à ce que l’on peut connaître en Italie ou en Espagne. L’effet ne peut donc être que limité, tant en terme de prix que de fréquence des trains.»

Selon vous, pourquoi la SNCF peine tant à s’aligner sur la concurrence?

Alice Rayon: «Trois principaux paramètres sont à prendre en compte. D’abord, l’entretien coûte cher. Les travaux sont nombreux et les investissements ont été massifs. Le tarif du péage a donc considérablement augmenté. Et, avec lui, les billets de train: +24% cette année. Ceci étant dit, ce tarif de péage est strictement le même pour Trenitalia et pour Renfe. Il ne défavorise donc pas seulement la SNCF.

Et, malgré cette forte augmentation, la SNCF projette un été de tous les records, avec des trains qui affichent complets longtemps à l’avance….

Alice Rayon: «Absolument. Et c’est là le deuxième paramètre. Comme vous le savez, nous avons traversé une longue période Covid au cours de laquelle il était difficile d’anticiper. Personne ne voyageait plus, et il était impossible de dire quand la fréquentation allait revenir à la normale. Ni même si elle allait fortement augmenter comme c’est le cas aujourd’hui. Or, pour être sûr d’avoir suffisamment de trains à l’instant T, il faut pouvoir le prévoir deux ou trois ans à l’avance. Car les trains coûtent extrêmement chers et se commandent très longtemps à l’avance. De plus, la SNCF est endettée et ne peut donc pas se permettre d’en commander trop. Bref, face à cette  forte hausse de la demande, l’offre de la SNCF n’est pas inextinguible. Pour faire face à la situation, la SNCF a donc fait le choix stratégique d’augmenter ses tarifs

@Kombo

Et quel est le troisième paramètre?

Alice Rayon: «C’est celui mis en avant par la SNCF, même si nous observons un peu moins ses effets chez Kombo. Celle-ci explique préférer multiplier les promotions ponctuelles pour compenser la hausse de ses tarifs. On se souvient par exemple de celle très récente organisée pour fêter les dix ans de Ouigo: tous les billets Ouigo et TER étaient proposés à 1 euro.»

De nouvelles compagnies sont-elles attendues ces temps prochains?

Alice Rayon: «Oui. Après ces gros acteurs dits «classiques», en viendront d’autres qui essayent actuellement de nouveaux modèles. Je pense aux trains couchette de Midnight Train, par exemple. Ou à Kevin Speed qui souhaite proposer des navettes à grande vitesse pour les voyages du quotidien. Bref, oui, il faut s’attendre à l’arrivée d’opérateurs qui souhaitent révolutionner le train comme Ouigo il y a dix ans.»

Dans votre clientèle, observez-vous une évolution de l’usage du train?

Alice Rayon: «Très nettement, oui. Les Français sont malins et recherchent de plus en plus des solutions alternatives. Autrefois, si vous vouliez aller à Besançon ou à Grenoble en venant de Paris, vous cherchiez un train Paris-Besançon ou Paris-Grenoble, et voilà tout. Désormais, on prend le train le moins cher possible sur une partie du trajet. Puis, on prend un bus sur l’autre partie. Ceci, pour éviter de payer très cher le billet de train, ou de passer dix heures dans un bus! Bref, on combine de plus en plus le meilleur des deux solutions.»

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