Remis en septembre à Ursula von der Leyen, un rapport signé de l’ancien Premier ministre italien (et ancien patron de la BCE) Mario Draghi dresse un bilan de la compétitivité sur le marché européen, et tire la sonnette d’alarme. Tout particulièrement pour l’industrie automobile. Voici ses principales conclusions.
Des réglementations trop souvent incohérentes ou restrictives
«L’avenir de la compétitivité européenne», tel est le titre de l’impressionnant rapport rendu par Mario Draghi à la présidente de la Commission européenne. 400 pages, au milieu desquelles l’industrie automobile occupe une large place. Rien de plus normal lorsqu’on sait que le secteur emploie quelques 14 millions de personnes en Europe, représentant ainsi «l’un des moteurs industriels» européens.
Sauf que plusieurs difficultés font face aux acteurs du Vieux continent, ces dernières années : le défi de la transition écologique, le développement du numérique, la montée en puissance de la Chine, et les multiples innovations américaines. De sérieux défis qui touchent, d’ailleurs, de nombreux secteurs, bien au delà de l’automobile. «Le problème n’est pas que l’Europe manque d’idées ou d’ambition. (…) Mais l’innovation est bloquée à l’étape suivante: nous ne parvenons pas à traduire l’innovation en commercialisation, et les entreprises innovantes qui souhaitent se développer en Europe sont entravées à chaque étape par des réglementations incohérentes et restrictives.», regrette Mario Draghi qui dénonce vivement le manque d’adaptation de l’Europe quand la concurrence s’adapte et évolue plus rapidement.
«L’imitation de l’approche américaine consistant à exclure systématiquement les technologies chinoises risquerait de retarder la transition énergétique, et donc d’imposer des coûts plus élevés à l’économie de l’UE.»
Mario Draghi
Des mesures trop souvent inutiles ou insuffisantes
«Le secteur automobile est un exemple clé du manque de planification de l’UE, qui applique une politique climatique sans politique industrielle.», déplore encore Mario Draghi qui prévoit l’échec de la mesure prônant l’interdiction des véhicules thermiques en 2035 si rien n’évolue d’ici là : «Les solutions en noir et blanc ont peu de chances de réussir dans le contexte européen.», prévient-il. Les droits de douane imposés aux Chinois ? Ils ne trouvent pas davantage grâce à ses yeux : «L’imitation de l’approche américaine consistant à exclure systématiquement les technologies chinoises risquerait de retarder la transition énergétique, et donc d’imposer des coûts plus élevés à l’économie de l’UE.»
Un satisfecit, tout de même : à ses yeux, les Européens semblent à la hauteur face aux enjeux liés à la production des batteries. Quand bien même la Chine domine le marché, il souligne le triplement des investissements européens et la multiplication des demandes de brevets qui placent l’U.E. juste derrière le Japon et la Corée du Sud. «L’U.E. pourrait répondre à sa demande intérieure en matière de batteries d’ici à 2030.»
L’I.A. devrait optimiser notre compétitivité
Restent les pistes à suivre pour améliorer la compétitivité européenne, ou du moins pour ne plus prendre de retard. Mario Draghi en préconise plusieurs, en tête de laquelle l’intelligence artificielle qui pourrait s’avérer d’une formidable aide. Et ceci, pour l’industrie automobile dans son ensemble, depuis l’optimisation de l’utilisation des matériaux jusqu’à la réduction de ses stocks, en passant par l’accélération des innovations et la rationalisation de sa logistique. Et, bien sûr, si l’ancien Président de la BCE critique les mesures protectionnistes que constituent les droits de douane, il ne conseille pas pour autant d’ouvrir les frontières, bien au contraire. Pour lui, la préservation des emplois est évidemment essentielle autant que les mesures qui permettront d’éviter leur délocalisation. Pas question que les entreprises (ou leurs usines) ne passent aux mains des Chinois !