A l’heure de l’éco-responsabilité, comment ces rendez-vous professionnels qui rassemblent et unissent clients, fournisseurs et collaborateurs tout en développant notre culture d’entreprise abordent-ils leur transition?
Comme tous les secteurs, celui de l’événementiel doit aujourd’hui assurer sa nécessaire transition écologique. Et, on l’a vu récemment avec Carine Le Saux du Groupe Barrière, les postes sont nombreux à devoir être étudiés, planifiés, transformés. Comme Barrière, le Groupe Momense a obtenu en 2022 la certification ISO 20121 qui engage les entreprises du secteur à maîtriser l’ensemble des enjeux et les pousse à une amélioration continue. Engagé depuis 2019 dans une forte démarche RSE, Momense réunit deux traiteurs premium (Saint-Clair et Potel & Chabot). Sa Directrice RSE Pauline Jacquemard nous en dit plus sur l’axe durable des offres désormais proposées aux entreprises. Et sur ce qu’elles impliquent comme engagements, et comme principaux«chantiers» à mener.
Parmi vos piliers RSE, la question des ressources prend tout particulièrement son sens dans ces métiers de la restauration événementielle. Qu’avez-vous mis en place?
Pauline Jacquemard: «Les enjeux sur l’alimentation et les achats durables sont effectivement énormes. D’abord, nous avons souhaité faire progresser notre politique achats afin de la rendre plus vertueuse. Nous faisons en sorte de nous approvisionner de plus en plus près de chez nous, et avons effectué un travail sur la labélisation. Notre équipe achats dispose désormais d’un cahier des charges stipulant ceux que nous souhaitons prendre en compte. Mais il s’est aussi agi de travailler à la végétalisation des assiettes. En ce sens, nous privilégions le végétal à la protéine animale, et avons effectué un vrai travail sur la création de nos cartes. Mais cela ne nous a pas semblé suffisant. Tout le travail de la direction marketing a été de packager des expériences éco-durables à 360°. C’est le cas des offres «Cool Green» pour Potel & Chabot et «Végétables» chez Saint-Clair. Elles incluent le menu, mais aussi la scénographie ou encore l’art floral. Par exemple, on privilégiera les plantes aux fleurs coupées, un art de la table éco-conçu (donc des matériaux recyclés), et un menu local et de saison. Pour nos commerciaux, ce type de propositions est nettement plus «simple» à proposer. Et pour nos clients aucune obligation puisqu’elles restent évidemment modulables et adaptables sur-mesure.»
Comme l’ensemble des acteurs vous soulignez un net changement de mentalité de la part de. vos clients. Rencontrez-vous toutefois des «résistances»?
Pauline Jacquemard : «Il y en a, même si c’est une petite minorité. Lorsqu’ils ne sont pas demandeurs, alors ce sont aux équipes du Groupe de les sensibiliser. En amont, nous avons formé nos équipes, tant commerciales que de production, pour que tous comprennent bien les enjeux d’aujourd’hui. Et pour qu’ils sachent expliquer qu’il est préférable, par exemple, d’éviter de nous demander un fraisier en plein hiver puisque cela supposerait d’aller chercher les fraises au bout du monde! En l’expliquant de cette façon, les gens comprennent vite qu’en effet la fraise n’a pas de sens au mois de décembre !»
Par ailleurs, vous travaillez au développement d’un nouvel outil qui mesurera le poids carbone de chaque plat. De quoi s’agit-il?
Pauline Jacquemard: «Nous sommes en train d’identifier de potentiels partenaires. Certains proposent des modulateurs qui permettent de modéliser l’impact carbone d’un événement. C’est une bonne chose mais, dans ce cas précis, ce n’est qu’une fois l’événement réalisé qu’on pourra déterminer son impact. Ce que nous préfèrerions faire, c’est être pro-actifs et intervenir dès la proposition gastronomique en donnant à nos clients le réel impact carbone de celle-ci. Ainsi pourra-t-il se déterminer en toute connaissance de cause. C’est un travail long et considérable pour nos équipes de production, mais nous y tenons.»
Autre pilier, les dynamiques socio-économiques locales, et notamment le gaspillage alimentaire et l’insertion professionnelle…
Pauline Jacquemard: «Sur la question du gaspillage alimentaire, nous avons mis en place des partenariats de récupération. Chez nous, l’essentiel du gaspillage se situe plutôt à la fin de l’événement. Notamment parce que des invités ne se sont pas présentés ou que certains clients souhaitaient proposer un buffet trop généreux. La société SAVR vient récupérer ces invendus pour les redistribuer aux associations d’aide alimentaire. Ainsi, nous avons distribué plus de 8 000 repas sur le premier semestre.
Par ailleurs, nous travaillons beaucoup avec les ESAT. Nous avons particulièrement à cœur d’intégrer des personnes en situation de handicap dans nos équipes. Pour ce faire nous avons développé plusieurs partenariats, notamment avec l’ESAT Berthier dans le 17eme arrondissement. Certains sont venus travailler avec nous à Rolland Garros et sur nos réceptions au Parc des Princes. L’objectif, à terme, est de pouvoir leur permettre d’intégrer nos équipes de manière permanente.»
Autre élément important, la décoration. Peut-elle être pleinement durable?
Pauline Jacquemard: «Nous sommes notre propre loueur de matériels, ce qui est une force. Cela nous permet de stocker les différents éléments pour les mutualiser et prolonger au maximum leur durée de vie. Néanmoins, il reste toujours quelques pièces de déco bien spécifiques, par exemple celles qu’a demandé un client et qu’aucun autre ne voudra. Sur ces produits là (ou sur ceux passés de mode), nous avons lancé début 2023 un partenariat avec la plateforme Bloowm qui nous permet de les revendre en seconde main. Nous attendons de voir les premiers résultats, mais notre idée est de reverser le fruit de ces ventes à des associations. Enfin, pour ce qui concerne les structures plus lourdes, nous avons démarré un test avec Muto qui les récupère pour en faire don à des associations de l’économie sociale et solidaire ou à des acteurs de la culture.»
Y a-t-il des domaines qui, aujourd’hui encore, posent des difficultés particulières?
Pauline Jacquemard: «Bien sûr. Elles sont souvent liées aux filières. Pour vous donner deux exemples parmi d’autres, je vous citerais les emballages, plastique notamment. Si nous ne proposons plus du tout de plastique à usage unique, nous devons subir celui de nos fournisseurs, ceux des emballages des produits que nous leur commandons. De même, nous avons encore beaucoup de mal avec la réutilisation de nos bouteilles de vin. Quant au deuxième exemple, il concerne la filière fleurs et plantes. Contrairement à d’autres, il ne leur a jamais été demandé de se structurer. Ils ne peuvent pas garantir la traçabilité de leurs produits, et ne peuvent donc pas nous fournir ces informations.