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Zone à Trafic Limité: Pour apaiser les quartiers, les villes s’organisent

par Juliette Solans

Mi-février, la Mairie de Paris a annoncé reporter de deux ans la mise en place de sa Zone à Trafic Limité (ZTL). En cause, la grogne montante de certains usagers. Mais les Parisiens ne sont pas les seuls à râler. Dans d’autres villes aussi les dents ont parfois grincé. Reste donc à discuter… pour mieux apaiser!

Etendue sur les Ier, IIème, IIIème et IVème arrondissements parisiens, la Zone à Trafic Limité (ZTL), rebaptisée «Quartier apaisé », devait entrer en vigueur au second semestre. Surprise: la Mairie de Paris vient d’annoncer son report à 2024. «Juste» le temps de mener une étude d’impact. Puis une vaste consultation publique qui devrait permettre «aux Parisiens, aux Franciliens et à tous les usagers de Paris, de donner leur avis sur le projet définitif. Les différentes parties prenantes (Ile-de-France Mobilités, RATP, Préfecture de police etc.) seront également consultées», précise la Ville.

Son objectif désormais: instaurer cette zone avant les Jeux Olympiques de 2024. «On parle là d’un projet très ambitieux. Il est normal de se donner le temps. On ne peut pas nous reprocher d’un côté de vouloir imposer les choses, et d’un autre de vouloir mener une vaste concertation», explique l’adjoint aux mobilités David Belliard. Mais au fait, qu’est-ce que c’est, une ZTL? 

C’est quoi, une ZTL ? 

Une ZTL est, comme son nom l’indique, une zone plus ou moins vaste au sein de laquelle la circulation est réservée aux riverains, aux services de secours, aux transports en commun et aux taxis. L’idée étant de réduire le trafic de transit en cœur de ville. Et même à le supprimer purement et simplement dans les quartiers concernés. Jusqu’ici la Mairie de Paris avait statué de manière drastique, interdisant la future zone aux VTC. Face aux protestations elle fait donc machine arrière. «C’est un geste fort de notre part. En contrepartie, nous attendons des VTC des engagements appuyés pour qu’ils aillent vers une flotte de véhicules plus propres et des avancées sur les questions sociales», précise aujourd’hui David Belliard. Toujours est-il que face aux mécontentements (des chauffeurs VTC, mais pas seulement!) les élus locaux n’avaient d’autre choix que de faire bouger leurs lignes. Et de discuter.

«Cela ne se fait pas sans difficultés. Normal, on change les habitudes!»

Julie Frêche, Vice-Présidente de Montpellier Méditerranée Métropole.

Ailleurs aussi les ZTL se déploient

Tout comme Paris, de nombreuses villes françaises combattent la circulation de transit. Une problématique majeure lorsqu’il s’agit de lutter contre la pollution et l’engorgement des centres-villes. A Montpellier tout particulièrement l’enjeu est de taille. Vice-présidente de Montpellier Méditerranée Métropole en charge du transport et des mobilités actives, Julie Frêche nous parlait ces jours-ci du fort engagement de sa ville en matière de mobilités durables. Le transit aussi fait partie de la stratégie engagée par les Montpellierains. «C’est une nécessité. D’autant que Montpellier a la particularité d’être aujourd’hui la seule métropole française à ne pas disposer de contournement routier. Pour éviter les embouteillages les véhicules passent (souvent vite) par des quartiers dont les voiries ne sont pas calibrées pour cela. Et ce transit se fait donc au détriment des habitants.

ZTL

Aussi nous avons généralisé la limitation de vitesse à 30 km/h dans toute la ville. Et nous mettons en place un plan de circulation anti-transit dans les quartiers concernés. Nous y spécialisons les accès riverains, les accès aux parkings, et ceux pour les gens se rendant dans les commerces de proximité, par exemple. De cette façon nous multiplions par deux (voire par quatre), le nombre de véhicules qui stationnent. » 

La résistance est parfois forte

Mais comme à Paris de tels réaménagements ne sont pas sans créer des tensions. Et nécessitent donc des concertations avec les résidents, comme c’est le cas avec ceux des quartiers des Arceaux ou de Clémenceau Rondelet notamment. «Effectivement, cela ne se fait pas sans difficultés. Normal, on change les habitudes! Mais tout cela n’est pas nouveau. En 1986, Georges Frêche (maire de Montpellier de 1977 à 2004, ndlr) avait décidé de supprimer le passage de la route nationale reliant Sète à Nîmes par la Place de la Comédie. Il l’avait alors piétonnisé, et avait fait construire un tunnel pour que cette nationale puisse passer en dessous. A l’époque les commerçants avaient hurlé au scandale. Ils avaient même essayé d’arrêter le chantier. Bref, c’était très musclé… »

Reste donc (comme Georges Frêche l’avait fait à l’époque) à résister aux mécontentements. A expliquer. Et à prendre les mesures qu’impose la nécessaire marche vers le zéro carbone. «Depuis cette époque, le nombre de voitures a été multiplié par six, et l’ancienne route nationale est toujours là. Nous avons donc décidé de fermer à la circulation le tunnel de la Comédie le 27 juin prochain. Il sera réservé au seul accès au parking installé en sous-sol. »

«C’est exactement comme lorsque les vélos ont été autorisés à prendre les rues à contre-sens. Au début ça a surpris, maintenant tout le monde s’est habitué!»

Nicolas Misiak, Président de la Commission mobilités à la Métropole de Toulouse

Non, la grogne n’est pas une fatalité!

Heureusement, certaines villes ne font pas toujours face à de virulents mécontentements. A Toulouse, par exemple, selon le Président de la Commission mobilités à la Métropole Nicolas Misiak les choses se sont plutôt bien déroulées. Les «Quartiers apaisés» se transforment sans trop de protestations. «Non, je n’ai pas l’impression qu’à Toulouse les choses se soient passées difficilement. Je n’ai pas reçu de courrier ni de réclamation en ce sens, en tout cas. Bien sûr, il y a un gros travail à entreprendre sur ce qu’on appelle le code de la rue.

C’est-à-dire le partage de l’espace public entre piétons, vélos, trottinettes et voitures. Dans ces zones apaisées c’est encore plus important qu’ailleurs: il faut apprendre à cohabiter. Entre piétons et cyclistes ce n’est pas toujours facile, par exemple. Mais c’est exactement comme lorsque les deux-roues ont été autorisés à prendre les rues à contre-sens. Au début ça a surpris, maintenant tout le monde s’est habitué!»

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