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Jean-Marc Zulesi: « Nos agriculteurs font un travail exceptionnel pour la biodiversité mais aussi pour l’image de la France »

par Yann Azran

Jean-Marc Zulesi nous ouvre les portes de la Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire pour décrypter les grands enjeux législatifs en matière environnementale.

La Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire

Le rôle de notre commission, c’est d’étudier tous les sujets qui touchent de près ou de loin au développement durable et à la protection de notre environnement. Tous les sujets de transports et en lien avec le développement des énergies renouvelables. Notre volonté, c’est aussi de pouvoir incarner tous les sujets en lien avec l’aménagement durable de nos territoires. Et donc effectivement, c’est dans cette salle que tous les textes en lien avec ces sujets sont étudiés. Le mercredi matin, nous nous réunissons pour auditionner différents acteurs et acter des nominations.

Les grands chantiers de la commission

Nous aurons sans doute un texte de loi sur l’eau, parce que c’est le sujet du XXIᵉ siècle, et nous voyons à quel point, dans nos territoires, le sujet revient. Nous aurons également un sujet sur la fast fashion, on y reviendra sans doute, puisque le groupe Horizon porte un texte de loi pour lutter contre la fast fashion et limiter l’impact environnemental.
Une volonté aussi d’avancer sur les sujets en lien avec les transports qui, vous le savez, me passionne, notamment sur l’avenir des concessions autoroutières. Nous aurons, sans doute, un débat autour de la sécurité dans les transports avec une volonté de travailler aussi sur ce que j’appelle l’acceptabilité du droit de grève, parce que nous ne sommes pas forcément en phase avec la vision du Sénat en ce qui concerne les grèves, notamment pendant les périodes de vacances scolaires. Et donc, nous aurons aussi notre vision, dans cette commission, sur le sujet du droit de grève. Et puis tous les sujets en lien avec la biodiversité seront traités dans cette commission durant l’année 2024.

Comment allier les besoins de répondre à l’urgence climatique actuelle tout en faisant en sorte que les agriculteurs français puissent s’y retrouver financièrement ?

Je suis présent sur ma circonscription à la rencontre de nos agriculteurs. J’ai passé beaucoup de temps au Salon de l’Agriculture. Le vrai sujet, c’est de pouvoir être rémunéré à la hauteur du travail qui est réalisé. Ça, c’est le premier point. Le deuxième sujet, c’est de pouvoir avoir moins de paperasse, faciliter un certain nombre de démarches, pouvoir simplifier l’accès aux subventions et à un certain nombre de dossiers à réaliser. Et le troisième point, les normes environnementales. Mais, j’ai très peu d’agriculteurs qui viennent me voir en me disant : « il faut réautoriser telle ou telle molécule. » Le vrai sujet, c’est de savoir comment est-ce que nous luttons contre la distorsion de concurrence. Nous continuons à faire venir des marchandises qui sont traitées avec des produits interdits sur notre territoire. Le vrai sujet, il est là.

Les agriculteurs savent aussi qu’ils sont les premiers touchés, notamment au niveau de leur santé, par l’utilisation de produits phytosanitaires. La grande majorité ne demande pas de remettre des produits chimiques dans les campagnes. Eux, ce qu’ils veulent, tout simplement, c’est que nous ayons une égalité dans les produits qui rentrent sur notre territoire. Et donc, le combat à mener n’est pas de faire une régression environnementale. Ma conviction ce n’est pas ça, c’est de pouvoir, d’abord, interdire quand il y a des solutions. Et le deuxième point, c’est de pouvoir mettre en place des clauses miroirs qui soient beaucoup plus fortes et applicables de sorte que nous limitions l’entrée de ces marchandises traitées avec des produits phytosanitaires qui sont interdits sur notre territoire.

Enjeux diplomatiques

Il y a deux enjeux. Le premier enjeu, c’est effectivement travailler avec ces pays, y compris des pays européens, sur ces sujets-là. Et le deuxième point, c’est de savoir comment, sans être donneur de leçons, on accompagne ces autres pays dans l’amélioration de leurs normes environnementales. Et c’est en cela aussi que je pense qu’au niveau européen, nous aurions dû avancer beaucoup plus fortement sur l’interdiction de la molécule de glyphosate, parce que c’était aussi une manière de monter le niveau environnemental sur l’ensemble du territoire européen et de se rapprocher de l’excellence de l’agriculture française. Ça, c’est important, parce que nous avons tendance, dans ce pays, à ne jamais dire ce qui se passe bien. L’agriculture française est reconnue dans le monde entier, c’est une agriculture de très grande qualité. Et donc, c’est à nous, à la fois de continuer d’exporter ce modèle, et de répéter que nos agriculteurs accomplissent un travail exceptionnel pour la biodiversité mais aussi pour l’image de la France.

La proposition de loi à l’étude sur la fast fashion

Le groupe Horizon, via la députée Anne-Cécile Violland, porte une proposition de loi sur le sujet. C’est important de souligner qu’aujourd’hui, nous avons des produits, des vêtements, des chaussures qui sont fabriqués à l’autre bout du monde, dans des normes environnementales, sociales qui n’ont rien à voir avec celles de notre pays et qui rentrent sur notre territoire à travers une publicité très volontariste. On vous accable de publicités sur votre téléphone. Cela touche notamment des publics modestes. Ces produits qui rentrent sont néfastes pour l’environnement, mais sont aussi néfastes pour nos commerces de proximité. Lorsque vous achetez des produits, on les voit fermer.

C’est une des conséquences de la fast fashion. Et donc, ma volonté, c’est d’être un soutien très fort de cette proposition de loi, de sans doute faire des propositions complémentaires pour aller plus loin. À la fois dans la définition de la fast fashion, à la fois aussi, dans l’introduction d’un éco score, de sorte que l’on puisse véritablement évaluer l’impact de ces vêtements, de ces chaussures, avec un équivalent du Nutri-Score. C’est essentiel de pouvoir bien informer l’acheteur de l’impact environnemental, mais aussi de l’impact que l’acte d’achat peut avoir sur le commerce de proximité.

Rendre la mobilité pour les Français durable et praticable sur l’ensemble du territoire

Par l’application stricte de ma proposition de loi. Derrière le service express régional métropolitain, il y a une vraie volonté, une ambition forte de pouvoir travailler sur la complémentarité des modes de transport. Que nous puissions nous passer d’un service de covoiturage à un train facilement, que nous puissions passer du vélo aux bus, aux trains, très facilement, via une éthique unique. Dans cette volonté aussi d’accélérer les chantiers. Et là aussi, il y a un vent de simplification dans ma proposition de loi pour aller plus vite, pour augmenter la cadence des trains, pour avoir une infrastructure de qualité. Tout simplement parce que les Français l’attendent. Les Français ont compris. Les Français savent qu’il faut changer de comportement, qu’il faut laisser peut-être sa voiture au garage, mais pour cela, il faut leur donner des alternatives. Et donc, une nécessité aussi d’améliorer l’offre de service et être sûr que si nous laissons notre voiture au garage, nous arriverons à l’heure au travail et à la maison pour amener son enfant à son activité le soir. C’est juste essentiel. Je vais entamer un peu un tour de France des mobilités pour faire le service après vote de ma proposition de loi. Nous allons lancer aussi des labellisations, des services express régionaux métropolitains. Il faut dire que beaucoup de territoires n’ont pas attendu ma proposition de loi pour avancer. Je pense notamment à ce qui se fait à Strasbourg, où vous avez un travail exceptionnel qui est mené, transpartisan et une volonté d’apporter des solutions. Donc, on a d’ores et déjà le RER strasbourgeois qui fonctionne très bien et qui est même victime de son succès. Et je pense que c’est un exemple à suivre. Donc ça, c’est sur le service express régional métropolitain.

Le leasing social, peut-être un petit rappel, nous nous étions fixé 25 000 véhicules. Durant l’année 2024, et au bout de quelques semaines, on a atteint les 50 000 véhicules. Donc encore une fois, victime de notre succès. Et ça, c’est une décision pragmatique de stopper le dispositif pour cette année. Mais ma volonté, c’est de pouvoir aller plus loin. Et, j’aimerais faire cette proposition au gouvernement : passer de 50 000 à 100 000 véhicules l’année prochaine, sur la base notamment d’une ouverture des critères. Aujourd’hui, ce sont des véhicules électriques fabriqués en France. C’est très bien, mais je pense qu’il faudrait que l’on ouvre ça, notamment aux véhicules d’occasion fabriqués en France et toujours électriques. Et pourquoi pas ? Pourquoi pas ouvrir ça aussi à des critères, de sorte que l’on puisse aussi offrir la possibilité à nos concitoyens de lever leurs inquiétudes, notamment sur l’accès aux zones à faible émission de mobilité.

Comment embarquer les entreprises dans la transition durable et leur faire respecter les normes ?

Il y a un sujet de pédagogie. Il faut reconnaître que lorsque vous êtes à la tête d’une entreprise, peut-être que vous passez à côté d’un certain nombre de dispositifs parce que vous êtes pris par la nécessité de faire tourner votre entreprise. Donc, les objectifs ne s’appliquent pas, comme nous l’avons souhaité dans la loi. Je dis ça, mais il y a aussi une vraie prise de conscience. Il y a de plus en plus de forfaits mobilité durable qui se déploient dans ces entreprises. Donc, il y a aussi des signaux positifs. Le deuxième sujet, c’est pourquoi pas, la nécessité d’être un peu plus contraignant et de se dire, à partir du moment où vous n’appliquez pas tel ou tel dispositif, qui aujourd’hui n’est pas obligatoire, nous nous donnons trois ou quatre ans. Si vous ne l’appliquez pas, nous le rendons obligatoire de sorte que vous l’appliquez. Et si vous ne l’appliquez pas, nous pouvons très bien revenir sur des aides publiques.

Je pense qu’il faut que nous mettions sur la table la conditionnalité des aides publiques en disant : « Si vous ne respectez pas un certain nombre de mesures dans la loi, vous n’avez pas d’aide publique. Donc, ça, c’est un sujet qui n’est pas très populaire, mais je l’assume. À l’heure où il y a un certain nombre de choix qui ont été faits par le gouvernement de limiter les dépenses, notamment en matière de transition écologique, je pense qu’il faut mettre sur la table ce sujet. À partir du moment où un chef d’entreprise ne respecte pas les normes voulues par la loi d’Orientation des Mobilités ou d’autres, nous mettons sur la table la fin des aides publiques à ces entreprises.

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