Une grande enquête faisant le point sur la manière dont les professionnels du transport de marchandise appréhendent aujourd’hui les défis de la transition écologique, vient d’être publiée. Des défis certes largement considérés, mais qui suscitent parfois un grand pessimisme et quelques paradoxes…
Plateforme dédiée au pilotage et à l’optimisation de l’activité du transport, la French tech Sightness a été créée par le cabinet de conseil bp2r, spécialiste du supply chain. Aux côtés de Carbone 4 (un cabinet indépendant spécialisé dans l’adaptation au changement climatique) Sightness et bp2r viennent de livrer une grande étude baptisée «Enquête 2023-(Ré)concilier transport de marchandises et décarbonation». Pas moins de 114 professionnels francophones du transport de marchandises (exerçant tous dans des entreprises donneuses d’ordres) ont été interrogés pour l’occasion. Avec, pour les auteurs de cette enquête, de grandes interrogations: «A l’opposé de tous les autres secteurs d’activité, les émissions de GES liées au transport de marchandises continuent d’augmenter. Alors comment ce challenge grandissant se traduit-il concrètement dans les organisations des chargeurs? Comment appréhendent-ils les défis de la décarbonation? Quels leviers choisissent-ils de déployer?…».
Un pessimisme affiché
Premier enseignement, l’heure est au franc pessimisme chez les acteurs du secteur. Pour 61% d’entre-eux, malgré les initiatives et les mesures mises en place, le transport de marchandises français n’atteindra pas l’objectif de neutralité carbone d’ici à 2050. Trop de retard pris. Trop d’efforts à fournir d’ici à cette échéance pas si lointaine… Mais, bien sûr, pessimisme ne signifie pas renoncement: 71% des donneurs d’ordres affirment tout de même avoir déjà élaboré un plan d’action dans leurs entreprises. Ou être en train de le faire.
«Le sujet est davantage porté par des «experts» positionnés au cœur de la direction. D’ailleurs, 28% des cadres ont ou vont avoir des objectifs liés à la décarbonation dans leur feuille de route.»
Etude Sightness
Les directions RSE s’emparent du sujet
Si en 2022 les enjeux de décarbonation étaient portés à 49% par les Directions Générales des entreprises, ils ne le seraient plus désormais qu’à 36%. Où sont passés les 13% ? Ce sont de plus en plus souvent les départements RSE qui viennent s’en saisir (pour 30% des personnes interrogées, contre 24% l’an passé). «Le sujet est davantage porté par des «experts» positionnés au cœur de la direction. D’ailleurs, 28% des cadres ont ou vont avoir des objectifs liés à la décarbonation dans leur feuille de route. Une proportion qui a presque doublé en deux ans», précise Sightness. Il n’en demeure pas moins que seulement 17% de ces professionnels se félicitent de la réelle (et très nécessaire) collaboration entre les équipes en charge de la décarbonation et les différents services pourtant fortement concernés. Comme la logistique et la supply chain, par exemple.
Quels leviers? Et pour quel budget?
Certes, les sondeurs remarquent peu d’évolution par rapport à la précédente étude. Toutefois, une large majorité (86%) assure désormais mesurer leurs émissions issues du fret. Parmi eux, 54% déclarent même les calculer sur l’intégralité des flux. Il n’étaient encore que 36% en 2022. Pour autant, preuve d’une motivation toute relative, 63% l’affirment: aucun budget dédié n’a été jusqu’ici instauré dans les organisations interrogées. Paradoxal peut-être, toujours est-il que face à la hausse du prix des énergies, elles sont tout de même de plus en plus nombreuses à faire le choix des solutions alternatives. C’est déjà ça!