Mathieu Bineau, Directeur Général chez Voltalis, nous explique comment la flexibilité électrique amène à une consommation d’énergie plus efficace et moins émettrice de CO₂!
Cette interview a été réalisée au World Impact Summit édition 2024.
Pouvez-vous nous en dire plus sur Voltalis ?
Chez Voltalis, on est les spécialistes de la flexibilité électrique. Ça veut dire quoi ? Ça veut dire qu’on optimise la consommation électrique des bâtiments et des entreprises, pour consommer non seulement moins, mais consommer au bon moment. Tout ça pour éviter au système électrique de démarrer des centrales thermiques, lui éviter d’émettre du CO₂, lui permettant ainsi d’utiliser beaucoup plus efficacement les énergies renouvelables. L’objectif de cette transition, c’est d’arriver à moins utiliser de carbone, d’essence, de gaz et donc d’utiliser plus d’électricité tout en la produisant proprement. Si on produit l’électricité proprement, on la produit avec des moyens qui sont intermittents. C’est-à-dire qu’on a du soleil ou du vent à certains moments et pas à d’autres. Donc, la production va devenir de plus en plus variable. Il va falloir que le système s’adapte pour éviter d’avoir à boucher les trous par des centrales à gaz qui sont fortement émettrices de CO₂. La transition énergétique a absolument besoin qu’on permette à la consommation d’électricité de se décaler au moment les plus utiles au système, pour justement être en face des moments où on sait la produire proprement. Ou de se réduire au moment où on aurait besoin d’aller faire appel à des centrales thermiques, des centrales d’appoint ou d’importer de l’électricité d’Allemagne qui la produit avec des centrales à charbon.
C’est vraiment un enjeu central dans cette transition énergétique, d’avoir à la fois la sobriété, d’optimiser les consommations, mais aussi, en même temps que la sobriété, de contribuer à la flexibilité du système et donc de choisir le moment où on consomme pour justement éviter d’avoir besoin de moyens carbonés d’appoint.
Qui sont les clients de Voltalis ?
Chez Voltalis, on a une originalité, c’est qu’on a comme client principal le réseau électrique. C’est à lui qu’on apporte ce service de baisser la consommation aux moments les plus utiles. Mais finalement, on a aussi un autre public qui est très directement impliqué, ce sont les particuliers et les entreprises, pour équiper leur bâtiment. On équipe totalement gratuitement des logements, des bâtiments commerciaux, des bureaux, des écoles, etc. de thermostats connectés ou d’une solution qui va permettre d’optimiser la consommation de leurs radiateurs, de leurs chauffages électriques et bientôt de leurs véhicules électriques pour justement permettre de consommer moins et mieux. Quelque part, les particuliers ou les entreprises ne sont pas vraiment des clients chez Voltalis, ce sont des adhérents. Ils participent à cette démarche collective tout en profitant directement des économies d’énergie, puisqu’ils vont gagner 15% d’économie sur leurs factures, mais sans avoir à payer Voltalis ou à acheter quoi que ce soit, puisqu’on couvre 100% de l’investissement nécessaire.
Comment ça fonctionne ?
La solution est gratuite pour le consommateur qui s’équipe, pour le particulier ou pour l’entreprise, parce que c’est finalement le système électrique qui va nous rémunérer, nous, Voltalis. Il va nous rémunérer à la place de la centrale qu’on a permis d’éviter et qui n’a pas tourné grâce à nous. En effet, le service que l’on rend à RTE, l’opérateur du système électrique, c’est de choisir en fonction de ce que lui nous demande, les moments où on va concentrer ces économies d’énergie, ces baisses de consommation, aux moments qu’ils lui rendent service. Lui rendre service, ça veut dire quoi ? Ça veut dire qu’il va nous demander de baisser la consommation à un certain moment pour éviter de payer une centrale. Donc, il va préférer nous payer plutôt que de démarrer la centrale. En plus, il se trouve qu’il nous paye moins cher que ce que coûterait la centrale. Donc, il y a un gain financier, mais il y a un énorme gain en termes d’émission de CO₂. Parce qu’évidemment, la meilleure énergie, c’est celle que l’on ne consomme pas. On peut être utilisé par RTE à la place d’autres productions. Cette gratuité pour le consommateur final vient de la participation à cette démarche collective, valorisée par RTE.
Où opérez-vous ?
Aujourd’hui, Voltalis est présente dans six pays en Europe mais on discute avec beaucoup d’autres pays en Europe et en dehors de l’Europe d’ailleurs. La France est le premier pays dans le monde qui a réuni les conditions pour développer l’approche que l’on a : rendre la consommation d’électricité flexible et permettre de la baisser chez les particuliers et les petites entreprises. C’est un concept qui existait déjà chez les gros industriels. La France est le premier pays à l’avoir autorisé et à l’avoir organisé pour les petits consommateurs. Mais effectivement, ça fait des émules, puisque depuis la guerre en Ukraine, je pense que tous les pays du monde ont réalisé que finalement, se passer du gaz, ça allait être nécessaire voir obligatoire un peu plus rapidement que prévu. Et donc, le développement de Voltalis s’est fortement accéléré par cette prise de conscience collective, que cette flexibilité dans le système électrique ne peut plus dépendre uniquement et principalement du gaz comme aujourd’hui. On doit trouver d’autres sources. Ces sources, c’est la gestion de la consommation comme Voltalis le fait, demain ça sera les batteries quand les coûts seront plus compétitifs.
Quel est l’objectif pour cette année 2024 ?
Notre ambition en 2024, c’est de fortement déployer notre solution en France. On devrait avoir quasiment doublé de taille en termes de nombre de bâtiments, de logements équipés. On a déjà raccordé plus d’un million de radiateurs aujourd’hui, on en aura deux millions à la fin de l’année. Donc, forte croissance en France avec beaucoup de création d’emplois à la clé. Parce qu’évidemment, il faut aller installer tous ces équipements. Puis, le deuxième objectif de Voltalis, c’est de réussir le lancement de notre solution dans d’autres pays, notamment en 2024. On va lancer la commercialisation au Royaume-Uni, en Grande-Bretagne, qui va représenter le deuxième moteur de développement de Voltalis. Si je projette un tout petit peu plus loin, d’atteindre 10 gigawatts de puissance de consommation pilotable à l’horizon de 2030. Aujourd’hui, on en a 600 mégawatts, donc une multiplication extrêmement forte par 5 dans les quelques années qui viennent.