Achat des véhicules, TCO, Bornes de recharge: Comment optimiser les coûts de la transition des flottes d’entreprise?

Par Laurent F.
Publié: Mis à jour: 6 minutes de lecture
Abundance of cars in crowded parking lot generated by AI

Sylvie Morello est responsable de la gestion du parc automobile de l’Etat auprès de la DAE (Direction des achats de l’Etat). Elle intervient sur l’ensemble des ministères et des établissements publics. Avec Mobileo Consulting, Yoann Magault  accompagne toutes les entreprises privées dans leur stratégie mobilité. Tous deux nous ont livré leur expertise et leurs conseils sur la question de l’électrification des flottes, du TCO, des coûts comparés et des politiques de recharge. Ceci, dans le cadre d’une table ronde qui s’est déroulée lors des 2èmes Rencontres Villes et Entreprises durables-Logistique et Flottes organisées le 23 juin dernier par Make a Move à l’Hôtel de Ville de Paris.

Achat ou leasing? De l’importance du kilométrage… et de la stratégie commerciale des constructeurs

Sylvie Morello : «Sur La LLD, on regarde toujours le prix de revient kilométrique. Quand on a opté pour l’achat (comme c’est le cas des flottes de l’Etat), la logique doit rester la même. Il s’agit de s’interroger, lorsqu’on a un véhicule peu roulant, de l’intérêt de conserver un véhicule au coût kilométrique souvent plus élevé que si on avait choisi de le louer en courte durée. La stratégie commerciale va aussi jouer un rôle très important. Depuis environ deux ans, le rapport de force avec les constructeurs s’est totalement inversé. Les crises post-Covid et les problèmes d’approvisionnement sont passés par là. Conséquence: la demande est supérieure à l’offre, et les prix sont donc beaucoup plus élevés. Les taux de remises dont pouvaient bénéficier les grands comptes se sont effondrés.

Par ailleurs, les gammes de véhicules évoluent rapidement (notamment en terme de technologies, donc de sécurité), et cela a aussi un impact sur la valorisation. Et puis, l’inflation pèse aussi sur l’entretien des véhicules. Il y a donc toute une stratégie à mettre en place. Favoriser les pièces de ré-emploi, par exemple. Ce sont des démarches plus vertueuses qu’il nous faut envisager.» 

Yoann Magault: «Dans le secteur privé, nous serons bien davantage en leasing que dans une optique d’achat. En tout cas, chez Mobileo nous voyons de plus en plus d’entreprises qui passent à la location. Essentiellement du fait de l’électrification des flottes car aujourd’hui le loueur maîtrise mieux la valeur résiduelle. Il s’engage dessus, alors qu’en optant pour l’achat il est encore difficile de prévoir à quel montant pourra se revendre notre véhicule dans quatre ou cinq ans.»

Un TCO en forte augmentation

Yoann Magault: «Comme l’a dit très justement Sylvie, face aux contraintes de production les remises ont fortement baissé. Les prix catalogue augmentent beaucoup aussi. Tout comme le prix des énergies. Sans oublier les taux des loueurs de longue durée. Concrètement, ce que l’on observe, ce sont des hausses de TCO entre 25% et 30%. Néanmoins, une énergie s’avère plus économique: l’électrique. Je parle là  des véhicules de tourisme. Depuis début 2023, nous observons dans les différentes «Car policies » qu’ils sont plus économiques de 10% à 15% par rapport au même véhicule dans une version essence. Voire parfois plus! Toutefois, une voiture électrique qui roulera peu peut s’avérer avoir un TCO identique à celui d’une thermique, voire même plus important. En clair, tout dépend des cas d’usage.»

La recharge au domicile des collaborateurs: une bonne idée?

Yoann Magault: «Pour les hybrides rechargeables comme pour les V.E. il faut toujours s’assurer que le collaborateur puisse recharger dans de bonnes conditions. On peut opter soit pour la recharge sur site, soit pour celle à domicile. La recharge à domicile semble être la solution la plus confortable quand, sur site, elle correspondra davantage à des salariés sédentaires ou à des véhicules statutaires. L’idée est donc de trouver le bon mix. Avec, bien sûr, toutes les questions naturelles qui se posent: par exemple, que fait-on si le collaborateur vient à quitter l’entreprise? Et comment savoir combien cela nous coûte vraiment? Une réponse existe: on peut faire appel à des câbles de recharge connectés qui permettent la remontée des données et un remboursement sur les bases réelles des dépenses effectuées. Mais ces câbles s’adressent surtout aux petits rouleurs ou aux conducteurs d’hybrides rechargeables.»

Sylvie Morello: «L’immense majorité des véhicules du parc de l’Etat sont des véhicules de service (donc mutualisés). Ils sont rechargés sur sites. Nous disposons de peu de véhicules de fonction. Les enjeux sur les bornes de recharge ne sont donc pas du tout les mêmes que dans le privé. De la même façon, en termes de fiscalité et de TCO, nous ne sommes pas dans le même équilibre. Nous ne sommes pas concernés par les sujets tels que l’amortissement ou l’avantage en nature. L’Etat encourage sa force entrepreneuriale et productive, mais il ne se traite pas de la même manière! (rires)»

Nous travaillons  à la mutualisation de l’usage des flottes de l’Etat, ce qui permettrait (…) d’optimiser ces flottes, de linéariser leur taux d’occupation, et finalement de réduire leur volume.

Sylvie Morello, responsable de la gestion du parc automobile de l’Etat auprès de la DAE

 

Comment déterminer la bonne politique à adopter?

Sylvie Morello: «Pour l’Etat, l’enjeu n’est pas seulement de passer à la mobilité électrique mais de diminuer aussi les consommations énergétiques. Donc d’encourager la mobilité alternative: le vélo, les transports en commun, le covoiturage… Et de s’interroger également  sur la nécessité des déplacements en privilégiant plutôt la visioconférence ou le télétravail. Nous travaillons aussi à la mutualisation de l’usage des différentes flottes, ce qui permettrait d’assurer aux conducteur de bénéficier d’un véhicule accessible mais aussi d’optimiser ces flottes, de linéariser leur taux d’occupation, et finalement de réduire leur volume

Yoann Magault: «Ce que nous recommandons chez Mobilier Consulting, c’est de partir de cas d’usage très concrets, mais aussi de la motivation des conducteurs. Et de cartographier le tout sur trois grandes thématiques. D’abord, sur les déplacements professionnels quotidiens, mais aussi sur ceux qui restent exceptionnels. Sur les déplacements personnels également, s’il s’agit de voitures de fonction. Deuxième thématique: le lieu et la durée de stationnement. Et enfin, le troisième, absolument essentiel: quelles sont les attentes des conducteurs, leurs craintes, leurs motivations? Cette cartographie permettra ensuite de déterminer combien de collaborateurs sont susceptibles de passer à l’électrique, comment ils veulent se recharger, combien sont susceptible de le faire sur site. En vous interrogeant ainsi, vous amoindrirez le risque d’installer trop de bornes ou pas assez. Vous pourrez déterminer une solide politique de conduite au changement. Et opter pour le Crédit Mobilité, notamment.»

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