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La filière française du liège se relance

par Laurent F.

Si le liège a connu naguère ses heures de gloire, il semblait être tombé en désuétude. Parce qu’il constitue une solide solution dans la transition écologique de très nombreux secteurs, la filière française entend bien se relancer. Et se structurer.

Majoritairement produit dans le sud de l’Europe et au Maghreb, plus de 300 tonnes de liège ont été récoltées cette année sur le territoire français. Des chiffres communiqués par l’Institut Méditerranéen du Liège (IML) qui réunit les quatre zones de production nationale (à savoir la Corse, le Var, les Pyrénées-Orientales et les landes de Gascogne). Concrètement, la culture du liège français s’étend sur 100 000 ha, et 82% de ces suberaies (les forêts de chênes-lièges) se situent dans des domaines privés. L’ambition de l’IML? Relancer la filière et participer de façon active à la transition écologique. «Le cours du liège prend de la valeur et les travaux engagés depuis une vingtaine d’années commencent à porter leurs fruits. Les secteurs aménagés et les réhabilitations sont remarquables mais beaucoup de travail reste à faire. L’objectif étant d’avoir une suberaie française productive, protégée et assurant de manière durable ses fonctions au niveau du maintien d’un patrimoine culturel et naturel exceptionnel en forêt méditerranéenne

@IML

Une multiplicité d’usages alliant performances techniques et utilité écologique

Pour les acteurs de la filière, les débouchés industriels doivent donc impérativement se développer partout sur le territoire. Tout particulièrement ceux du liège dit «mâle» ou «brulé» jusqu’ici peu demandé. De couleur grisâtre, difficile à travailler en raison de sa dureté, il est broyé en granulés pour intégrer le processus de fabrication d’agglomérés (isolants) ou de produits à base de liège reconstitué. Et s’il est aujourd’hui peu valorisable, c’est pourtant sur lui que reposent donc tous les espoirs de développement. «C’est ce liège qui permettra de relancer la filière puisque les opérations de démasclage auront pour conséquence dans les prochaines décennies de produire du liège femelle: du liège bouchonnable, c’est-à-dire de bonne qualité.» 

Et la dynamique semble d’ores et déjà enclenchée. «Dans le Lot-et-Garonne, un industriel transforme ce liège pour des utilisations spécifiques comme l’armement, l’aérospatiale ou l’aéronautique. En Corse, des producteurs l’utilisent dans la conception de petite maroquinerie ou encore l’élevage d’escargots.», explique l’IML. Sans oublier les industriels varois qui en appellent au liège mâle pour l’isolation de bâtiments ou la petite maroquinerie. «L’utilisation du liège dans le bâtiment n’est pas nouvelle. Elle était cependant tombée en désuétude face aux laines minérales et au polystyrène. Elle fait son retour de par ses qualités techniques et environnementales. Ainsi, le liège trouve sa place dans les chaines de fabrication de panneaux d’isolation pour les murs ou dans les sols. Mais le liège est aussi présent dans notre quotidien, parfois sans que nous le sachions. Loisirs, transports, textile, industries stratégiques, nous en utilisons tous les jours. Ce liège «invisible» apporte performances techniques et utilité écologique.»

Parc à liège @IML

Un pare-feu, et un capteur de CO2 particulièrement efficace

Mais ces multiples utilisations industrielles ne sont pas les seuls avantages que le liège peut présenter, loin s’en faut. «Le chêne-liège est une essence forestière particulièrement adaptée au feu: en cas d’incendie, il brûle mais il est protégé par son écorce, et ne meurt donc pas. Il peut ainsi reconstituer son houppier en quelques années, favorisant la reconstitution de l’écosystème forestier et des habitats associés. De plus, lorsque les suberaies sont cultivées et entretenues pour la production de liège, notamment grâce au pâturage, elles sont moins sensibles au feu et permettent de constituer des zones d’appui à la lutte contre les feux de forêts. Il s’agit donc d’une espèce de prédilection pour la constitution de pare-feux arborés.»

Par ailleurs, les suberaies exploitées stockeraient davantage de carbone que celles laissées à l’abandon. Toujours selon les experts, par la récolte du liège l’arbre écorcé séquestrerait 2,4 à 4 fois plus de CO2 qu’un arbre non écorcé. «Grâce à un travail multipartenarial entre l’ASL Suberaie Varoise, la Région Sud, Diam Bouchage et le Centre National de la Propriété Forestière PACA, le chêne-liège varois est éligible au Label Bas Carbone depuis 2022. Deux projets de reboisement de chênes-lièges menés par l’ASL Suberaie Varoise ont ainsi reçu ce Label.»

@IML

Nos bouchons se recyclent

Restent nos fameux bouchons de liège. La Fédération Française du Liège regroupe les syndicats professionnels de fabricants. Dans une démarche circulaire et solidaire, la FFL a mis en place une filière de recyclage reposant sur des apports volontaires. Les bouchons collectés sont ensuite revendus comme matière première; ils sont recyclés et réutilisés à d’autres fins. L’intégralité de l’argent récolté finance ensuite des actions humanitaires ou la plantation de chênes. Depuis 2010, 550 millions de bouchons ont été récoltés, soit 2 200 tonnes de liège. La plantation de 7 500 chênes-lièges a ainsi été financée dans les Pyrénées-Orientales.

Pour connaître les points de collecte: recyclage.planeteliege.com

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