Un pays hôte parmi les plus pollueurs de la planète. Des conflits en Ukraine et au Proche Orient. Le retour d’un climato-sceptique à la tête des Etats-Unis, et de nombreux pays absents… Que faut-il vraiment attendre de la COP 29 qui se tient jusqu’au 22 novembre en Azerbaïdjan? On fait le point.
Le 11 novembre, la COP 29 de Bakou s’ouvrait avec le discours du patron de l’ONU Climat Simon Stiell qui en appelait alors à un grand sursaut, comme une sorte de mouvement de résistance internationale face à une situation géopolitique particulièrement malmenée: «Il est temps de montrer que la coopération mondiale n’est pas au point mort. Elle est à la hauteur du moment.» Un excès d’optimisme? Peut-être. L’appel était néanmoins nécessaire lorsqu’on sait que, deux jours plus tard, le Global Carbon Project rendait public les résultats de son étude qui fait référence.
Non seulement les émissions CO2 ne baissent toujours pas, mais elles continuent d’augmenter. Quelque 37,4 milliards de tonnes de CO2 seront émises en 2024. Soit une hausse de 0,8% par rapport à 2023. L’espoir de limiter le réchauffement à 1,5 degré par rapport à l’ère préindustrielle est donc bien mince… Pour y parvenir, déjà porté à 116 milliards de dollars par an depuis 2022, le nouvel engagement devra obligatoirement être augmenté. Jusqu’à (selon les pays pauvres) se chiffrer en milliers de milliards annuels. Sauf que…
La situation internationale complique considérablement les choses
Avant même l’ouverture de cette COP 29, dire que les signaux n’étaient pas au vert semblait un doux euphémisme. La situation géopolitique d’abord. Les conflits en Ukraine et au Proche-Orient relèguent l’urgence climatique au second plan pour bien des pays. Les crises politiques et sociales aussi. Sans compter le retour de Donald Trump au pouvoir (on y reviendra plus bas). Et sans oublier que, pour la deuxième année consécutive, après les Emirats arabes unis, le pays hôte de la COP est particulièrement pollueur. «Les énergies fossiles représentent 90% de ses revenus issus de l’exportation, 60% des recettes de l’Etat et 30 à 50% du PIB.», avance l’Agence Internationale de l’Energie. Est-ce pour toutes ces raisons (ou au moins pour certaines d’entre elles)?
Toujours est-il que, si la COP de Dubaï avait battu tous les records de participations, celle de Bakou devrait briller pour l’exact inverse. Peu de chefs d’Etats sont attendus, et peu de patrons de la finance. Emmanuel Macron ne fera pas le déplacement. Pas plus que l’actuel Président américain Joe Biden, le Premier ministre canadien Justin Trudeau ou l’Australien Anthony Albanese. Alors que le Brésil accueillera la COP 30, le Président Lula ne fera pas non plus le voyage. Quant à la Présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen, «la Commission est dans une phase de transition et la Présidente va se concentrer sur ses devoirs institutionnels.» a justifié l’un de ses porte-parole. Porte-parole qui ne pouvait pas avoir oublié la récente déclaration du Parlement européen: «Les violations des droits de l’homme actuellement perpétrées par l’Azerbaïdjan sont incompatibles avec son statut de pays hôte de la COP 29.»
Bon à savoir: Du côté français, la ministre de la Transition écologique Agnès Pannier-Runacher devrait, elle, faire le déplacement du 20 au 24 novembre, pour la phase finale des négociations. «Il n’est pas question de faire la politique de la chaise vide, la France est mobilisée dans les négociations climatiques.», explique son cabinet.
Le réchauffement climatique ? Un «canular» pour Donald Trump
Reste que, malgré ce contexte si particulier, les choses devront coûte que coûte avancer. Au menu : fixer un nouvel objectif chiffré collectif et remplacer celui établi en 2009. Une nouvelle régulation du marché (controversé) des crédits carbone est aussi prévu. Un sujet qui, semble-t-il, tient particulièrement à cœur de la présidence azerbaïdjanaise. Mais, on l’a dit plus haut, le contexte international et le retour de l’administration Trump aux USA sèment le doute. Et c’est dans l’attentisme que pourraient bel et bien plonger les pays participants. Rappelons que, pendant sa campagne victorieuse, le Républicain a multiplié les propos climato-sceptiques, qualifiant même le réchauffement climatique de «canular». A son programme figuraient la révision (voire l’abandon) des subventions aux énergies renouvelables et aux véhicules électriques. Et la promesse de «forer à tout va».
Un climat d’incertitude totale
Fera-t-il de la sortie des Etats-Unis de l’accord de Paris une mesure symbolique? De nombreux experts le craignent. «Au moment de prendre ses fonctions, en janvier, le président élu trouvera sur son bureau les décrets préparés par son équipe de transition, dont l’un d’eux, une fois signé, officialisera le divorce entre les Etats-Unis et les 194 autres parties signataires.», annonce déjà FranceInfo. Quant à la directrice des politiques de l’ONG Union of Concerned Scientists, Rachel Cleetus, dans le quotidien The Guardian elle alertait: «La nouvelle administration Trump va pulvériser la diplomatie climatique mondiale à coups de boulet de démolition.» Reste un effet domino que craignent aussi nombre de spécialistes. Comme Lola Vallejo, de l’Institut du développement durable et des relations internationales: «La victoire très nette de Donald Trump fait peser un climat d’incertitude très important sur les négociations de la COP29. »