Comme prévu, c’est donc ce 26 février que la Commission Européenne a présenté son projet de loi Omnibus. Et, comme attendu, en résulte un allègement singulier de ses exigences en terme de CSRD. Voici ce qu’il faut retenir de ces dernières annonces.
Après des mois de débats intenses, et pour préciser les nouveaux contours des différentes réglementations liées à son Green Deal pour les entreprises, la Commission Européenne avait donc donné rendez-vous le 26 février, alors qu’elle devait annoncer son projet de loi Omnibus. Avec une volonté principale: dans la droite ligne du rapport Draghi publiée en 2024, il s’agissait désormais de réduire les obligations environnementales pour restaurer la compétitivité. Ceci, via «un effort de simplification sans précédent, en réduisant les charges administratives d’au moins 25% pour les grandes entreprises, et d’au moins 35% pour les PME.», précise-t-elle dans un communiqué.
Pour Stéphane Séjourné, le Vice-président exécutif pour la prospérité et la stratégie industrielle (et grand défenseur de la simplification annoncée), ce projet de loi Omnibus propose moins de charges administratives, un accès plus facile au financement et des règles plus claires et plus prévisibles. En résumé: «Nous conservons nos objectifs, mais nous changeons la manière de les atteindre.».
Seulement 20% des entreprises seraient désormais concernées
Ce que propose ce texte? De limiter le champ d’application de la CSRD aux seules entreprises de plus de 1 000 employés, enregistrant un chiffre d’affaires de 50 millions d’€ et/ou un bilan de plus de 25 millions d’€. Près de 80% des entreprises jusqu’ici concernées ne le seraient donc plus. Quant aux exigences du reporting, elles seraient elles aussi réduites. La Commission européenne propose ainsi de les décaler de deux ans (jusqu’en 2028) pour les entreprises tenues de présenter le rapport en 2026 ou 2027.
Par ailleurs, un groupe de travail devrait être rapidement mis en place afin de rationaliser ces exigences en réduisant le nombre de points de données requis. «Une version simplifiée des reportings liés à la CSRD devra être proposée dans les prochains mois ». Néanmoins, si elle limite ces obligations aux seules, grandes entreprises, pour toutes les autres l’U.E. maintient la possibilité de déclarer volontairement leurs propres reportings, de facto allégés.
Le devoir de vigilance lui aussi très allégé
Concernant le devoir de vigilance, la Commission Européenne propose de reporter là aussi d’un an (au 26 juillet 2028) l’application des exigences de diligence tout en avançant d’un an (juillet 2026) l’adoption de ses lignes directrices. A la clé, une large simplification là encore. Avec, notamment, un périmètre resserré aux seuls partenaires commerciaux directs (jusqu’ici l’ensemble de la chaîne de valeur était concerné) et la réduction de la fréquence des évaluations: cinq ans au lieu d’un. Il s‘agira également de limiter la quantité d’informations demandées aux PME et aux petites ETI. Et de supprimer purement et simplement l’obligation de mettre en œuvre les plans climatiques.
Des réactions partagées
Si nombre d’entreprises ont vu d’un bon œil ces allègements proposés, nul doute que les débats risquent de se raviver dans les semaines et les mois qui viennent. Pour Markus J. Beyrer, Directeur général de BusinessEurope, «en réduisant les charges réglementaires et les rapports inutiles, le premier Omnibus permettra aux entreprises de contribuer plus efficacement aux objectifs de durabilité de l’UE tout en préservant la compétitivité de l’économie européenne.» Et de demander à l’U.E. d’aller même encore plus loin: «Faire mieux avec moins de normes et des normes plus claires, c’est ce que demandent les entreprises européennes de toutes tailles» Un point de vue loin d’être partagé par les différentes ONG. L’association Notre Affaire à tous, par exemple, dresse un implacable constat : «il s’agit d’une dérégulation massive et sans précédent, qui rappelle la politique de déréglementation en cours aux États-Unis.»
Et maintenant?
Rappelons que, pour le moment, ces allègements n’ont valeur que de propositions. Sébastien Mandron (Directeur RSE chez Worldline et spécialiste de la CSRD) nous le disait très récemment: «Le 26 février ne sera qu’un point de départ. L’U.E. fera une proposition qui sera ensuite revue et re-re-vue… (…) De toutes façons, on n’arrêtera pas la RSE.»