Ce 16 septembre, la Cour des comptes a publié son premier rapport annuel consacré à la transition écologique. Dans un contexte de restrictions budgétaires, et quand les politiques populistes tendent à relativiser fortement la réalité du réchauffement climatique, ce rapport vient évaluer l’efficacité de l’action publique menée et formule des recommandations. Voici ce qu’il faut en retenir.
Des actions payantes, mais largement insuffisantes
«La transition écologique n’est pas une politique publique parmi d’autres : elle doit irriguer l’ensemble des politiques, nationales comme territoriales», affirme la Cour des Comptes dans son premier rapport annuel consacré au sujet. Insistant sur la nécessité d’une gouvernance spécifique et d’une programmation budgétaire pluriannuelle crédible, elle rappelle que depuis 1990 la France a réduit de plus de 30% ses émissions GES et enregistré des progrès dans la qualité de l’air ou la gestion de l’eau et des déchets. Des résultats certes encourageants, mais qui restent insuffisants au regard des engagements pris. Car -doit on le rappeler?- la France vise une baisse de 55% de ses émissions d’ici 2030 et la neutralité carbone à l’horizon 2050. Or, «le rythme de diminution des émissions s’est ralenti et l’atteinte de la neutralité paraît de plus en plus incertaine», regrettent les experts. D’autant que l’empreinte carbone globale du pays continue de croître… Le diagnostic est tout aussi préoccupant pour la biodiversité. Ou quand l’adaptation au changement climatique «accuse un retard préoccupant».
Renforcer la cohérence nationale et territoriale: Une nécessité!
Pour la Cour des Comptes, la réussite de la transition passe par l’articulation de multiples leviers: la réglementation, la fiscalité, la sobriété et la programmation des dépenses. Certes, la création en 2022 du Secrétariat général à la planification écologique (a marqué une étape importante, mais son rôle doit être consolidé selon les Sages qui recommandent de «lui conserver une pleine capacité d’impulsion, de suivi et d’aide à la décision». Quant aux collectivités locales, elles jouent un rôle décisif. Toutefois, des incohérences et un déficit de coordination sont relevés par les Sages, notamment sur la gestion des déchets ou le recul du trait de côte. La Cour appelle alors à un dialogue renforcé entre État et territoires.
Plus de 200 milliards d’euros par an… au minimum!
Mauvaise nouvelle pour le budget: selon les experts financiers, atteindre la neutralité carbone suppose de doubler les investissements d’ici 2030 pour atteindre plus de 200 milliards d’euros par an. Pire encore: environ 100 milliards supplémentaires seraient nécessaires pour l’atténuation du changement climatique, auxquels s’ajoutent les dépenses liées à l’adaptation, à la biodiversité et à l’économie circulaire. Aussi, la Cour recommande de renforcer également la Stratégie pluriannuelle des financements de la transition écologique, publiée pour la première fois en 2024, et de la transmettre au Parlement au printemps pour éclairer le débat budgétaire.
«La transition vers la neutralité carbone est beaucoup moins coûteuse que l’inaction»,
Rapport annuel sur la transition écologique, Cour des Comptes, 16 septembre 2025
Accélérer la transition écologique: Une condition sine qua non pour préserver la compétitivité économique
Et la Cour des comptes de rappeler à toutes fins utilises que le changement climatique pèse déjà lourdement sur la société et les finances publiques. En effet, les crises agricoles, les canicules ou les inondations récentes se chiffrent chaque année en centaines de millions d’euros. Et les projections indiquent que ce coût annuel pourrait presque doubler d’ici 2050. À l’inverse, chaque euro investi en prévention permettrait d’économiser jusqu’à 3 euros de dommages évités. «La transition vers la neutralité carbone est beaucoup moins coûteuse que l’inaction», souligne le rapport en citant les travaux de la Banque de France et du réseau NGFS. Et pour cause: en France, le statu quo pourrait entraîner une perte de 11,4 points de PIB d’ici 2050, tandis qu’une transition ordonnée limiterait ce recul. En résumé, investir massivement dès maintenant est à la fois un impératif environnemental et une décision rationnelle sur le plan économique. Enfin, l’institution prévient: accélérer la transition n’est plus une option, mais une condition sine qua non pour préserver la compétitivité économique, la qualité de vie des citoyens et la soutenabilité des finances publiques. CQFD.