Face au millefeuille administratif et à la nécessité de procéder à de sérieuses réductions budgétaires, les voix sont nombreuses à réclamer une refonte des agences publiques. Ce 3 juillet, la commission d’enquête parlementaire du Sénat a rendu public un rapport sur le sujet. Si cette commission préconise un profonde réorganisation de ces agences, il relativise toutefois l’ampleur des économies qui en découleraient.
La commission d’enquêtes chargé du rapport sénatorial rendu public ce 3 juillet a fait les comptes: elle a recensé plus de 1 800 agences, opérateurs et organes divers. Un chiffre si considérable que de plus en plus nombreux sont ceux qui appellent à une réorganisation totale. Rappelons ainsi les déclarations de Valérie Pécresse, présidente de la Région Ile-de-France, qui en appelait récemment à fermer certaines de ces agences, et notamment l’ADEME. Ou celles du Premier ministre François Bayrou qui dénonçait dès janvier 2023 un «labyrinthe» manquant de contrôle démocratique réel et de visibilité claire. Sous l’impulsion du président du groupe LR Mathieu Darnaud, le Sénat a donc décidé de se saisir du sujet en mettant en place cette commission qui, pour l’occasion, s’est concentrée sur 434 opérateurs, 317 organismes consultatifs et 1 153 organismes publics nationaux. Présentées par la rapporteuse Christine Lavarde (LR) et le président Pierre Barros (PCF), ses conclusions sont sans appel.
Trop d’interlocuteurs, pas assez de réactivité
Si -à l’origine- la création de ces agences publiques s’inscrivait dans un mouvement de modernisation, leur multiplication aura finalement engendré un «archipel» aux frontières floues, dont les contours précis ne sont pas précisément connus par l’Etat lui-même, selon le rapport de la commission d’enquête. Pour les sénateurs, aucun doute: leur trop grand nombre complique singulièrement la lisibilité pour les collectivités territoriales. Et génère une avalanche d’interlocuteurs, complexifiant en conséquence la proximité et la réactivité initialement souhaitées.
Vers des fusions… et des fermetures?
Face à la situation, la commission propose plusieurs axes de réforme. A commencer par la fusion d’organismes aux compétences proches. Par exemple entre l’Afpa et les Greta, du côté des formations professionnelles. Le transfert de missions des Agences Régionales de Santé (ARS) vers les services déconcentrés de l’État, au niveau régional et départemental, est aussi préconisé. Comme la disparition progressive d’agences jugées obsolètes est aussi vivement souhaitée. C’est le cas notamment de l’Agence bio. Et de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru) dont les missions pourraient être transférées aux préfectures. L’Agence nationale du sport (ANS), elle, pourrait voir ses crédits réorientés vers les collectivités tandis que l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) pourrait être intégrée aux services préfectoraux.
Des économies certes, mais à quel prix?…
Quid des économies engendrées par de telles mesures? Sur ce point crucial, le rapport demeure prudent. Selon lui, si la réduction des effectifs et des frais de fonctionnement peut évidemment générer des économies, les gains resteront limités par la nature même des missions publiques. Comptez environ 540 millions d’euros, une somme très en deçà des 40 milliards d’économies pour 2026 souhaités par le gouvernement. Mais la bataille des chiffres fait rage. Il y a peu, le RN avait suggéré la suppression de 80 agences, évaluant les économies à 8 milliards d’euros, tandis que LR prévoyait une économie de 5 milliards. Des chiffres très différents d’une source à l’autre. La Ministre des Comptes publics, Amélie de Montchalin, a d’ailleurs elle-même reconnu l’imprécision des chiffrages avancés par le gouvernement. D’ailleurs, la question pourrait bien ne pas se trouver là. En effet, en optant pour cette simplification, il s’agit certes d’économiser en rationalisant, mais sans fragiliser les services. De moderniser, mais sans complexifier davantage. D’économiser certes, mais de ne pas s’éloigner des enjeux et des grands discours d’hier. Car quels signaux le gouvernement enverrait-il en supprimant des agences dont les actions sont fortement identifiées dans la transition écologique et l’urgence climatique?