Mis à mal dans certains pays du monde mais néanmoins fondamentaux à toute démarche RSE, les différents critères ESG sont aujourd’hui contrôlés et évalués par des agences spécialisées, permettant alors aux entreprises un accès facilité à des financements durables. Mais, en l’absence de réglementation, les incohérences sont nombreuses. C’est pourquoi l’U.E. vient de décider de remettre de l’ordre en mettant fin à l’auto-régulation.
MSCI, Moody’s ESG, Sustainalytics, Vigeo Eiris… Aussi sérieuses puissent-elles être, les agences de notation spécialisées ESG évoluent aujourd’hui dans un cadre réglementaire des plus flous, évaluant des milliers d’entreprises chaque année selon des grilles d’évaluation qui leur sont propres sans qu’aucune harmonisation ne vienne fixer des critères objectifs et universels. C’est ainsi, par exemple, qu’une même entreprise peut obtenir des scores très différents d’une agence à l’autre, ouvrant ainsi la porte au greenwashing. Et pour cause: certaines organisations parviennent à afficher des notations flatteuses sans réelle transformation de leur modèle d’affaire ou de leur gouvernance Face à ces dérives, Bruxelles a décidé d’intervenir en légiférant sur ce secteur jusque-là auto-régulé.
De nouvelles obligations pour éviter le greenwashing
Adopté récemment, le règlement européen sur les agences de notation ESG prévoit plusieurs obligations majeures. Une transparence accrue des méthodologies, d’abord. Ainsi, les agences devront publier leurs critères d’évaluation, leurs sources de données et les pondérations utilisées. Elles devront aussi s’enregistrer obligatoirement auprès de l’ESMA (Autorité européenne des marchés financiers). Y-compris les agences non européennes si celles-ci opèrent dans l’UE. Autre obligation: la séparation stricte entre activités de notation et services de conseil afin d’éviter les conflits d’intérêts. Enfin, ces agences de notation devront impérativement mettre en place des règles de gouvernance internes, à commencer par la rotation des analystes et la supervision des processus d’évaluation. L’objectif de ce «serrage de vis»? Restaurer la confiance dans les notations ESG qui conditionnent désormais l’accès aux financements verts ou à impact.
Une seule arbitre: l’ESMA
On vient de le dire: ce sera donc l’ESMA qui aura la charge de contrôler les agences de notation ESG opérant en Europe. Charge à l’Autorité européenne des marchés financiers de réaliser des audits, de publier des rapports d’évaluation, et de sanctionner en cas de manquements graves. Elle pourra également suspendre ou retirer l’agrément des agences ne respectant pas les obligations de transparence ou de gouvernance.
Quelles seront les prochaines étapes?
Si elle a d’ores et déjà été adoptée, la réglementation n’entrera pleinement en vigueur que dans le courant de 2026, avec une période transitoire de mise en conformité pour les agences. D’ici là, l’ESMA devrait publier un recensement des agences autorisées, ainsi que les lignes directrices des bonnes pratiques à suivre. Avec une autre ambition, à plus ou moins long terme: que ce cadre inspire d’autres régions du monde pour pouvoir instaurer une harmonisation internationale des notations ESG. Reste toutefois à attendre (et à surveiller) sa mise en œuvre concrète dans l’UE. Et, bien évidemment, à accompagner les différents acteurs pour faire de cette nouvelle réglementation un sérieux levier de transformation durable.