Sandor Alarcon, chargé de mission partenariats au sein du Commissariat pour l’Energie Atomique, explique le rôle et les initiatives de cet acteur clé de la transition énergétique lors du salon professionnel Produrable.
Qu’est-ce que le CEA ?
Le CEA est un organisme public de recherche ayant pour mission de développer une expertise scientifique destinée à éclairer les Français, l’État et les industriels sur les grands enjeux qui nous attendent. Historiquement, on développe des systèmes de production énergétique, de conversion et de stockage énergétique, tout en travaillant également sur la gestion circulaire des matières associées à ces systèmes. En terme de transition énergétique et de mix énergétique futur, on bénéficie d’une expertise solide et met également en avant l’économie circulaire. Par exemple, on a construit la filière électronucléaire française en boucle fermée, en appliquant les principes de l’économie circulaire au secteur nucléaire.
Ce choix, spécifique à la France et à certains autres pays, consiste à maximiser la réutilisation des matières issues des réacteurs, contrairement à d’autres modèles comme celui des États-Unis. Le CEA a ainsi conçu une filière électronucléaire industrielle complexe intégrant les technologies, le business model et la démarche d’économie circulaire. Aujourd’hui, l’Institut des Sciences et Énergies Circulaires (ISEC), l’institut pour lequel je travaille qui est basé dans le Gard, accompagne les industriels sur ces questions en se basant sur les réponses que nous avons développées ces dernières années.
Une expertise élargie pour l’économie circulaire et la mobilité durable
Actuellement, on travaille sur plusieurs projets liés à l’économie circulaire et à la mobilité durable. Un exemple marquant est un projet d’écoconception de verre industriel. Dans le nucléaire, on utilise des matrices en verre pour inerter les déchets, ce qui implique une maîtrise de formulations de verre complexe. Cette expertise, on souhaite la mettre au service de l’industrie verrière. Concrètement, on identifie des industriels produisant des déchets susceptibles d’être valorisés pour fabriquer du verre. On intervient ensuite pour accompagner la mise en relation, définir la formulation adaptée et établir le processus industriel permettant de transformer ces déchets en verre utilisable.
On développe un simulateur décisionnel destiné à la mobilité de demain pour le gouvernement. Cet outil numérique permet de modéliser différents scénarios à 30 ans, en prenant en compte des variables comme le nombre de véhicules électriques de certains modèles ou l’usage des trains pour des trajets courts et longs. L’objectif est de déterminer l’impact en termes de ressources matérielles pour les infrastructures et les moyens de transport associés.
Une expertise en scénarisation au service de nouvelles industries
Historiquement, on a toujours travaillé sur la scénarisation pour anticiper les besoins énergétiques. On s’est donné les moyens de capter et de traiter des données afin de prédire l’avenir sur des sujets pertinents. Aujourd’hui, on met ces compétences au profit d’autres : d’autres industries, d’autres industriels, d’autres collectivités … En ce moment nous travaillons pour l’Etat.
Prédire la mobilité pour guider les choix industriels et énergétiques
Les simulateurs de prédiction sur la mobilité à horizon 30 ans sont étroitement liés à l’énergie, mais aussi aux choix industriels actuels. L’industrie automobile est en pleine transition vers l’électrique, ce qui soulève des questions sur les investissements nécessaires et leur impact. Dans le contexte de la réindustrialisation, les décisions prises aujourd’hui auront des conséquences sur les 25 prochaines années. Il s’agit de déterminer quels modèles de voitures et quelles batteries développer. Les simulateurs et les prédictions permettent d’évaluer si les choix actuels sont réalistes par rapport aux usages futurs, en tenant compte des enjeux énergétiques et industriels à long terme.
Maintenir l’excellence nucléaire pour une souveraineté énergétique
Pour l’énergie nucléaire, le CEA continue de jouer un rôle majeur pour maintenir la qualité de la production d’électricité nucléaire en France. Les crises récentes ont rappelé l’importance de cette énergie pour garantir une indépendance et une souveraineté énergétique, bas carbone. Si le discours autour du nucléaire était plus mesuré il y a une dizaine d’années, aujourd’hui, il est reconnu comme un élément clé pour relever les défis de transition énergétique, de réindustrialisation et de souveraineté.