Vulgarisée par Boris Cyrulnik, la notion de « résilience » a depuis envahi notre quotidien. Au point de s’appliquer aujourd’hui à l’urbanisme. Mais que faut-il entendre lorsqu’on parle de villes ou de quartiers résilients ?
Depuis que Boris Cyrulnik a popularisé la notion de «résilience» qui vient souligner notre capacité à évoluer et à agir en dépit de nos souffrances et de nos traumatismes passés, le terme a fait son chemin. Et voilà qu’il touche désormais aux groupes, aux entreprises, aux collectivités. Jusqu’à concerner nos villes et nos quartiers. Faut-il qu’ils aient connu de terribles drames pour être désormais résilients ? Bien sûr que non !
Si l’on s’appuie sur la définition qu’en donne l’Agence Nationale pour la Rénovation Urbaine (ANRU), une ville résiliente est une ville «dont toutes les fonctions essentielles –résidentielles, économiques, culturelles, sociales, transport et communication – sont adaptées pour mieux résister aux aléas qui l’affectent, en premier lieu le changement climatique.» Ainsi, s’agit-il notamment des villes et des quartiers qui agissent pour développer les mobilités douces, les constructions durables, voire les écoquartiers. Ceux qui travaillent à sortir des énergies fossiles, qui veillent à favoriser l’économie circulaire et/ou qui développent des projets de végétalisation. De manière générale, ceux qui œuvrent pour la cohésion sociale, la solidarité, le vivre-mieux tout simplement.
L’ANRU soutient la résilience
Établissement public industriel et commercial (EPIC), l’ANRU est né il y a tout juste vingt ans sous l’impulsion de Jean-Louis Borloo, alors ministre délégué à la Ville, après qu’il ait fait voter la loi d’orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine. Une politique ambitieuse qui visait à réhabiliter des centaines de quartiers dans lesquels s’étaient concentrées les difficultés sociales, économiques et urbaines. L’ANRU fut alors chargée de piloter et de financer le Programme National de Rénovation Urbaine (PNRU) alors doté de plus de 12 milliards d’euros.
Depuis, l’agence (aujourd’hui présidée par Catherine Vautrin, par ailleurs députée de la Marne et présidente de la communauté urbaine du Grand Reims) finance et accompagne les collectivités et les bailleurs sociaux dans la mise en œuvre des projets de rénovation des quartiers les plus vulnérables. Au total, l’ANRU a permis jusqu’ici la transformation de plus de 700 quartiers de métropole et d’outre-mer. Voici quelques exemples des grands travaux de résilience et des projets, petits et grands, qu’elle soutient ou a soutenu.
Des travaux de rénovation énergétique d’envergure
Parmi les nombreux chantiers permis par les accompagnements de l’ANRU, citons notamment la Cité des arts, un complexe culturel situé à Saint-Denis-de-La-Réunion et devenu en partie autonome grâce à la pose des panneaux photovoltaïques. Ou le groupe scolaire Simone Veil de Nétreville, près d’Evreux. Ce bâtiment fonctionne en basse consommation grâce à ses locaux écoconstruits et, là aussi, un équipement photovoltaïque qui couvre 40% de ses besoins. Enfin, à Port-de-Bouc, à quelques kilomètres de Marseille, tout un quartier sera bientôt desservi par un réseau de chaleur thalassothermique.
Un soutien à l’économie circulaire
À Nancy, «la maison du réemploi du quartier du Plateau de Haye récupère les matériaux des bâtiments déconstruits, sensibilise au réemploi et permet l’emploi solidaire», explique l’ANRU. À Val-de-Reuil, près de Louviers, un parking sera reconverti en ressourcerie qui permet «de consommer durablement, de limiter les déchets et de faire de l’insertion par l’emploi» tandis qu’à Stains (93) une boucle alimentaire locale a été créée qui va de la production de fruits et légumes à la récupération des biodéchets.
Une végétalisation massive
Parmi les initiatives de végétalisation notables, zoom sur Sens. Début 2021, la sous-préfecture de l’Yonne a implanté une micro-forêt (600 m2) au pied d’immeubles d’habitation dans le quartier des Champs-Plaisants réputé «vulnérable». Il faudra dix ans pour que les 1 800 arbres plantés prennent la forme d’une forêt. Mais d’ici là, une ferme urbaine et un jardin partagé ont aussi été installés. Beaucoup plus au sud, à Marseille, des sols désimperméabilisés et renaturés feront office de climatiseur et d’éponge en cas de fortes pluies. Et, à Mantes-la-Jolie (78), des protections solaires, des toitures végétalisées et des cool roofs permettront un meilleur confort l’été.
Accès aux soins, cohésion sociale et solidarité facilités
Du côté du lien social, l’ANRU travaille aussi aux côtés des collectivités. Comme pour le Médicentre prochainement installé au cœur d’un quartier de Saint-Pol-sur-Mer, une banlieue de Dunkerque. Ou à Grenoble où le tiers-lieu la Machinerie est géré par la Régie de quartier. Au-delà des animations proposées, il propose une conciergerie, des services du quotidien, un espace bricolage, et même une boutique de réemploi.
Quartiers résilients : 50 quartiers (très) accompagnés
«Aux fragilités multiples qui caractérisent nos quartiers se superposent désormais des crises et des chocs nouveaux qui les rendent plus vulnérables. Nous avons la responsabilité collective de renforcer les capacités d’adaptation et de transition de ces territoires face aux crises de notre siècle : les quartiers de 2030 devront être plus résilients», souligne Catherine Vautrin. On y reviendra dans un prochain article : en septembre dernier, l’opération «Quartiers Résilients» a été annoncée par Olivier Klein, Ministre chargé de la Ville et du Logement. Ce dispositif transversal permettra l’accompagnement des 453 quartiers de métropole et d’outre-mer. Avec un accompagnement renforcé de 50 quartiers ciblés. Les vingt-cinq premiers viennent tout juste d’être dévoilés quand les vingt-cinq autres le seront très prochainement.
Un soutien partenarial d’ampleur
Plus de 250 millions d’euros seront ainsi mobilisés par l’ANRU et ses partenaires pour financer des opérations améliorant la résilience des projets. Et les partenaires sont nombreux depuis Action Logement jusqu’à France Ville Durable en passant par les Agences de l’eau, l’ADEME, la Banque des territoires. Ou encore l’Union Sociale pour l’habitat, l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) et, bien sûr, le Ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, via la Direction générale de l’Aménagement, du Logement et de la Nature (DGALN). «Quartiers Résilients est une réponse partenariale forte pour une transformation de la ville plus ambitieuse et adaptée aux défis de notre temps. Nous nous réjouissons de son déploiement dans les territoires dès 2023 !», ajoute encore Catherine Vautrin.